30 août 2017

Bruxelles (18e ch F), 30 août 2017 – Responsabilité des pouvoirs publics – Refus de nomination – Indemnisation des frais de défense devant le Conseil d’Etat avant la loi du 20 janvier 2014 – Point de départ du délai de prescription d’une action en responsabilité contre l’Etat en raison d’un refus implicite de nommer – Distinction entre intérêts moratoires et compensatoires – Incidence sur la prescription

Un arrêt du Conseil d’Etat du 22 décembre 2005 annule le refus implicite de nomination d’un membre du personnel scientifique de l’Etat.

A la suite de cet arrêt, le membre du personnel concerné est nommé avec effet rétroactif et l’Etat lui paie la partie de la rémunération qui lui est due pour la période entre le jour auquel il aurait dû être nommé et sa réintégration.

Le membre du personnel cite l’Etat belge devant le Tribunal de première instance francophone de Bruxelles, demande l’indemnisation de ses frais de défense devant le Conseil d’Etat, l’indemnisation du préjudice moral augmenté des intérêts compensatoires et il réclame également les intérêts, soit moratoires sur les arriérés de traitement qui lui ont été payés en principal soit compensatoires sur l’indemnité qui lui aurait été versée pour perte de traitement.

La 4e chambre du Tribunal francophone de Bruxelles, par un jugement du 2 avril 2015, alloue une indemnité pour frais de défense de 1.320 € et condamne l’Etat belge aux intérêts compensatoires sur les indemnités correspondant aux arriérés de traitement, mais uniquement pour une période non frappée par la prescription quinquennale.

S’agissant des frais de défense devant le Conseil d’Etat avant la loi du 20 janvier 2014, la Cour décide qu’il convient de faire une application combinée des articles 1382 du Code civil et 1022 du Code judiciaire et que la demande d’indemnité de 5.000 € pour frais de défense est largement justifiée.

Quant au dommage moral, est rejetée la thèse de l’Etat belge – et du premier juge – selon laquelle la réclamation aurait été prescrite, au motif que plus de cinq ans avant la citation le membre du personnel réunissait les conditions pour être nommé à titre définitif. L’arrêt précise que la nomination du membre du personnel concerné nécessitait une décision individuelle telle que l’arrêté royal pris par l’Etat belge après l’arrêt d’annulation du Conseil d’Etat. L’élément créateur du dommage est bien le refus implicite et fautif de nommer le membre du personnel à l’un des emplois vacants. Ce refus implicite a fait l’objet d’un recours en annulation devant le Conseil d’Etat et ce recours a interrompu la prescription du droit d’obtenir la réparation du préjudice moral.

Quant aux intérêts sur les arriérés de traitement, la Cour constate que l’Etat belge a nommé le membre du personnel avec effet rétroactif ; il était donc redevable d’arriérés de traitement. Les intérêts sont destinés à réparer un retard dans le paiement des rémunérations. Il s’agit d’intérêts moratoires, au taux légal comme le prévoit la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération, de sorte que les objections élevées par l’Etat belge pour invoquer la prescription d’intérêts compensatoires sont dénuées de pertinence.

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